Code canadien de déontologie professionnelle
des psychologues

Principe I : Respect de la dignité de la personne

Énoncé de valeurs

Dans le cours de leurs travaux en tant que scientifiques, praticiennes ou scientifiques-praticiennes, les psychologues entrent en contact avec plusieurs groupes et individus différents, y compris les participantes à une recherche, les clientes cherchant de l'aide à propos de problèmes d'ordre personnel, familial, organisationnel ou communautaire, les étudiantes, les personnes sous supervision, les employées, les collègues, les employeurs, les tierces personnes et les membres du public en général.

Dans ces contacts, les psychologues acceptent le principe du respect de la dignité de la personne comme un droit fondamental, ce qui veut dire que chaque être humain doit être traité en principe comme une personne ou une fin en soi et non pas comme un objet ou un moyen à prendre pour arriver à une fin.  Ce faisant, les psychologues reconnaissent que toutes les personnes ont une valeur innée en tant qu'êtres humains.  Cette valeur innée doit être appréciée pour ce qu'elle est; elle n'est ni diminuée ni augmentée par des différences telles que culture, nationalité, ethnie, couleur, race, religion, sexe, statut marital, préférence sexuelle, capacités mentales ou physiques, âge, statut socio-économique ou toute autre préférence ou caractéristique personnelle, condition ou statut.

Bien que les psychologues aient la responsabilité de respecter la dignité de tous les individus avec qui elles entrent en contact en tant que psychologues, la nature de leur contrat avec la société exige que leur principale responsabilité soit normalement envers les personnes auprès de qui elles exercent leurs activités sientifiques et professionnelles et qui, par le fait même, se retrouvent dans une position plus vulnérable (e.g., clientes, étudiantes, participantes de recherches).  Cette responsabilité est presque toujours plus grande envers ces personnes qu'envers les gens moins directement impliqués (e.g., employeurs, tierces personnes et public en général).

L'adhésion au concept des droits moraux est un élément essentiel au respect de la dignité de la personne.  Les droits à l'intimité, à l'autodétermination, à la liberté personnelle et à la justice naturelle sont d'une importance particulière pour les psychologues qui ont la responsabilité de protéger et de promouvoir ces droits dans toutes leurs activités.  En tant que psychologues, elles ont la responsabilité de développer et d'appliquer des règles pour le consentement éclairé, la confidentialité, le traitement équitable et l'accès à des procédures légales en bonne et due forme qui sont conformes à ces droits.

Comme les droits individuels existent concurremment aux droits des autres et des soins responsables (voir Principe II), des circonstances telles que la possibilité de préjudices graves pour elles-mêmes ou pour les autres, une perte d'autonomie ou un ordre de la cour pourraient annihiler certains aspects des droits à l'intimité, à l'autodétermination et à la liberté personnelle.  En effet, de telles situations pourraient être assez sérieuses pour créer l'obligation d'avertir les autres (voir Normes I.40 et II.36).  Il n'en demeure pas moins que les psychologues gardent la responsabilité de respecter dans toute la mesure du possible les droits de l'individu ou des personnes concernées et de faire ce qui est nécessaire et raisonnable pour prévenir d'autres privations des droits de la personne.

De plus, les psychologues reconnaissent que leur responsabilité de consulter au plan de l'éthique et de sauvegarder les droits des personnes est proportionnelle au degré de vulnérabilité d'un individu, d'une famille, d'un groupe ou d'une communauté et/ou à la capacité des personnes de contrôler leur milieu ou leur vie.  C'est pourquoi les psychologues considèrent comme leur responsabilité de multiplier les balises afin de protéger et de promouvoir les droits des personnes auprès de qui elles interviennent et ce, proportionnellement à leur degré de dépendance et à leur capacité d'agir de façon délibérée.  Ainsi, plus de mesures seront prises pour protéger et promouvoir les droits des personnes entièrement dépendantes que pour les personnes partiellement dépendantes qui, elles-mêmes, nécessitent plus d'interventions que les personnes indépendantes.

Le respect de la dignité de la personne comprend également le concept de justice égale pour tous.  En ce qui concerne les psychologues, ce concept présuppose que toute personne a le droit de bénéficier également des contributions de la psychologie et de la même qualité au niveau des processus, procédures et services qu'elles leur offrent.  Bien que les psychologues prises individuellement puissent se spécialiser et intervenir auprès de populations spécifiques, elles ne doivent pas exclure des personnes par caprice ou de façon discriminatoire.

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Normes de déontologie

En adhérant au principe du respect de la dignité de la personne, les psychologues devraient :

Respect général I.1 démontrer un respect approprié pour les connaissances, l'intuition, l'expérience et les domaines d'expertise des autres;

I.2 ne pas se livrer publiquement à des farces désobligeantes (e.g., dans des déclarations publiques, des présentations, des rapports de recherche ou avec des clientes), à des descriptions dégradantes des autres, y compris des farces se rattachant à la culture, à l'ethnie, à la couleur, race, religion, sexe, etc. ou autres remarques pouvant porter atteinte à la dignité des autres;

I.3 utiliser un langage respectueux de la dignité des autres ( e.g. termes neutres par rapport au sexe) dans toute communication écrite ou verbale;

I.4 s'abstenir de toute forme de harcèlement y compris le harcèlement sexuel;
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Droits généraux I.5 éviter ou refuser de participer à des pratiques incompatibles avec le respect des droits légaux, civils ou moraux des autres;

I.6 refuser de conseiller, d'entraîner ou de donner de l'information à quiconque, selon le jugement de la psychologue, aurait l'intention d'utiliser ces connaissances ou techniques à des fins contraires aux droits de la personne;

I.7 faire tous les efforts possibles afin de s'assurer que les connaissances psychologiques ne seront pas utilisées intentionnellement ou non pour enfreindre les droits de la personne;

I.8 respecter le droit des consommatrices de services psychologiques, des participantes à la recherche et des étudiantes de sauvegarder leur propre dignité;
La non-discrimination I.9 ne pas pratiquer, approuver et faciliter quelque forme de discrimination injuste que ce soit ou y collaborer;
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Consentement éclairé I.10 agir de façon à prévenir ou à corriger les pratiques qui sont injustement discriminatoires;

I.11 rechercher une participation aussi complète et aussi active que possible de la part des personnes qui seront affectées par les décisions;

I.12 respecter et intégrer autant que possible les opinions et les désirs des autres quant aux décisions qui les affectent;

I.13 obtenir un consentement éclairé de toutes les personnes indépendantes et partiellement dépendantes pour tous les services psychologiques qui leur sont fournis, sauf dans une situation d'urgence ( tentative de suicide).  Les psychologues agiraient alors avec l'assentiment de ces personnes mais un consentement pleinement éclairé devrait être obtenu dans les plus brefs délais (voir également Norme I.22);

I.14 obtenir des participantes le consentement éclairé à toute activité de recherche impliquant des risques et des mesures pouvant porter atteinte à leur vie privée ainsi que le consentement éclairé à toute tentative de changer le comportement de celles-ci;

I.15 établir et utiliser des formulaires de consentement signés, spécifiant les dimensions du consentement éclairé ou reconnaissant que ces dimensions ont été expliquées et comprises, si de tels formulaires sont requis par la loi ou voulus par la psychologue, la (ou les) personne(s) donnant le consentement ou l'organisation employant la psychologue;

I.16 reconnaître que le consentement éclairé est un processus dont l'objectif est de parvenir à s'entendre pour travailler en collaboration plutôt que d'avoir simplement une signature sur un formulaire;

I.17 En obtenant un consentement éclairé, donner toutes les informations qu'une personne raisonnable et prudente, une famille, un groupe ou une communauté aimeraient connaître avant de prendre une décision ou de s'engager dans une activité.  La psychologue transmettra cette information dans un langage que la ou les personnes peuvent comprendre (et, si nécessaire, fournir une traduction dans une autre langue) et elle prendra toute mesure raisonnable et nécessaire afin de s'assurer que l'information fut effectivement comprise;

I.18 en obtenant un consentement éclairé, s'assurer qu'au moins les points suivants sont compris: but et nature de l'activité, responsabilités mutuelles, bénéfices et risques probables, alternatives, conséquences possibles de l'inaction, option de refuser ou de se retirer à tout moment sans encourir de préjudice et procédure à suivre pour retirer son consentement, si désiré;

I.19 dans des recherches sur des individus, familles, groupes ou communautés ou lorsque des services leur sont rendus à la demande ou pour l'usage de tiers, préciser clairement la nature des rapports multiples à toutes les parties en cause.  Ceci devrait comprendre, sans y être limité, les objectifs de la recherche ou du service, l'usage qui sera fait de l'information recueillie et les limites de la confidentialité.  Les tiers peuvent être une école, la cour, une agence gouvernementale, une compagnie d'assurance, la police, un organisme octroyant des fonds spéciaux;
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Consentement libre I.20 prendre tous les moyens raisonnables pour s'assurer que le consentement n'a pas été donné sous l'influence de la contrainte ou sous pression (Norme III.31 à la fin de 1.21);

I.21 ne pas entreprendre une recherche s'il semble que le consentement a été donné sous l'influence d'une contrainte quelconque ou sous une pression excessive (Voir également Norme III.31);

I.22 prendre tous les moyens possibles afin de confirmer ou rétablir le consentement libre, lorsque ce consentement a été obtenu sous contrainte ou dans des conditions d'extrême besoin;

I.23 respecter le droit des individus de cesser, à tout moment, de participer à une recherche ou de recevoir un service, en étant sensibles aux expressions non verbales exprimant le désir d'arrêter, lorsque l'individu a des problèmes de communication verbale (e.g., jeune enfant, personne handicapée verbalement);
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Traitement juste/procédures judiciaires I.24 travailler et agir dans un esprit de traitement équitable;
I.25 aider à établir et à respecter des procédures judiciaires en bonne et due forme et d'autres moyens de justice naturelle pour ce qui est de l'emploi, de l'évaluation, de la division des tâches, de la rédaction et de la révision par les pairs;

I.26 accorder une compensation juste aux autres pour l'usage de leur temps, énergies et intelligence à moins que cette compensation n'ait été refusée à l'avance;
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Vulnérabilité I.27 pour toute recherche impliquant des groupes vulnérables ou des personnes en perte d'autonomie ou incapables de donner un consentement éclairé, demander une révision éthique indépendante et pertinente avant de décider d'aller plus loin lorsqu'il s'agit de questions se rapportant à la protection des droits de la personne;

I.28 dans les recherches qui peuvent s'effectuer aussi bien avec des personnes capables de donner un tel consentement, éviter de recourir à des personnes qui ne sont pas en mesure de donner un consentement éclairé;

I.29 prendre des mesures afin d'obtenir un consentement éclairé auprès des personnes qui sont légalement responsables ou qui ont été nommées légalement pour donner leur consentement au nom des individus incapables de donner leur consentement en leur propre nom;

I.30 tenter d'obtenir la participation volontaire et suffisamment éclairée de toute personne incapable de donner un consentement éclairé et ne pas procéder sans cet assentiment à moins que le service ou l'activité de recherche apparaisse comme un bénéfice direct pour la personne;

I.31 face au degré de liberté dont dispose une participante en position de dépendance vis-à-vis de la psychologue (e.g., étudiante, employée) pour consentir à participer à une recherche, faire preuve de prudence particulière.  Ceci peut comprendre, sans y être limité, d'offrir à cette personne un choix d'activités lui permettant de réaliser ses objectifs de formation ou d'emploi ou encore lui donner un choix parmi un éventail de projets de recherches ou d'expériences de travail;
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Intimité I.32 recueillir et explorer seulement l'information qui se rapporte à l'objectif (ou aux objectifs) au(x)quel(s) la personne a consenti;

I.33 dans les activités de recherche et de services, prendre soin de ne pas empiéter sur les frontières culturelles ou personnelles, d'individus ou de groupes à moins d'en avoir clairement obtenu la permission;

I.34 consigner, par écrit seulement, l'information nécessaire à un service suivi et coordonné ou à la réalisation des objectifs d'une recherche spécifique ou encore qui est requise par la loi;

I.35 respecter le droit des employées, supervisées, étudiantes ou stagiaires en psychologie à une intimité personnelle raisonnable;

I.36 manipuler, accumuler et transférer tous les documents, écrits et non écrits (dossiers informatisés, bandes vidéo) de façon à protéger leur sécurité et leur caractère privé.  Ceci implique de prévoir des mesures pour disposer des dossiers en cas de maladie grave ou de décès;

I.37 pour les dossiers sous le contrôle des psychologues, prendre toutes les mesures acceptables, y compris les détruire ou les rendre non identifiables, pour s'assurer qu'ils ne restent pas personnalisés plus longtemps qu'il ne le faut, compte tenu des intérêts des personnes identifiées dans ces dossiers ou de la réalisation des travaux de recherche pour lesquels ils ont été constitués ou de ce qui est requis par la loi;
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Confidentialité I.38 prendre soin de ne pas divulguer de l'information obtenue sur des collègues, des clientes de collègues, des étudiantes et des membres d'organismes dans l'exercice de sa profession ou de ses activités s'il y a tout lieu de croire que cette information est considérée comme confidentielle par ces personnes à l'exception de ce qui est requis ou justifié légalement (voir Normes IV.5 et IV.16);

I.39 quand des recherches ou des services s'adressent à une famille, aux membres d'un groupe ou d'une communauté, clarifier les mesures qui seront prises pour protéger la confidentialité de ces personnes et les responsabilités qu'elles devront prendre pour se protéger mutuellement;

I.40 partager l'information confidentielle avec d'autres personnes seulement avec le consentement éclairé des personnes concernées ou de façon à ce que leur identité demeure cachée, à l'exception de ce qui est requis ou justifié légalement et dans les cas de dangers réels ou potentiels de dommages physiques graves ou de mort;
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Prolongement de la responsabilité I.41 lorsqu'approprié, encourager les autres à respecter la dignité des personnes et s'attendre au respect de leur propre dignité;

I.42 assumer la responsabilité générale de leurs assistantes, étudiantes, supervisées et employées quant au respect de la dignité de la personne, toutes ces personnes encourant, néanmoins, des obligations similaires.

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