Dans toute discipline, l'une des attentes de base en matière d'éthique est que ses activités soient bénéfiques pour les membres de la société ou du moins, qu'elles ne lui causent pas de tort. Par conséquent, les psychologues démontrent une préoccupation active pour le bien-être de l'individu, de la famille, du groupe ou de la communauté avec qui elles entrent en relation directement ou indirectment à titre de psychologues. Cependant, conformément au Principe I, la principale responsabilité des psychologues est de sauvegarder le bien-être des personnes directement impliquées dans leurs activités et qui, par le fait même se trouvent normalement dans une position plus vulnérable (e.g., participantes à des recherches, clientes, étudiantes). Aussi, leur responsabilité envers les personnes impliquées indirectement (e.g., employeurs, tierces personnes, le public en général) vient en second lieu.
Comme les individus sont habituellement concernés par leur propre bien-être, l'obtention d'un consentement éclairé (voir Principe I) est l'une des meilleures façons de s'assurer que leur bien-être sera protégé. Cependant, ce n'est que lorsque le consentement éclairé va de pair avec des soins responsables que, d'un point de vue éthique, la personne concernée bénéficie de la meilleure protection de son bien-être.
Les soins responsables amènent les psychologues à prendre soin de discerner entre les torts et les bénéfices potentiels inhérents à leurs activités, de prédire la probabilité de leur occurrence, de procéder seulement si les avantages possibles l'emportent sur les inconvénients possibles, de développer et appliquer des méthodes minimisant les inconvénients et maximisant les bénéfices ainsi que de prendre la responsabilité de remédier aux effets nuisibles qui ont découlé de leurs activités.
Pour mettre ces mesures en pratique, les psychologues reconnaissent que la compétence et la connaissance de soi sont nécessaires. Elles considèrent qu'une action incompétente est non éthique en soi, car il est douteux qu'elle puisse être bénéfique et vraisemblable qu'elle soit dommageable. Aussi, les psychologues ne s'adonnent-elles qu'à des activités relevant de leur compétence et elles accomplissent leur travail de façon aussi compétente que possible. Elles acquièrent et utilisent les connaissances actuelles les plus pertinentes, tout en y contribuant, dans le meilleur intérêt des personnes concernées. Elles se livrent également à une réflexion personnelle dans le but de cerner comment leurs valeurs propres, leurs attitudes, leurs expériences, le contexte social (e.g., culture, ethnie, couleur, religion, sexe, orientation sexuelle, niveau d'aptitudes physique et mentale et statut socio-économique) influencent leurs actions, interprétations, choix et recommandations. De cette façon, les psychologues augmentent la probabilité que leurs activités soient bénéfiques et qu'elles ne nuisent pas aux individus, familles, groupes et communautés avec qui elles entrent en relation dans l'exercice de leurs fonctions.
Les psychologues définissent tort et bénéfice selon les dimensions physiques et psychologiques. Elles s'intéressent à des facteurs tels que les sentiments de valeur personnelle, la peur, l'humiliation, la confiance mutuelle, le cynisme, la connaissance de soi et le savoir, tout en accordant une égale importance à des aspects comme la sécurité physique, le confort, la douleur et les blessures. Leur attention se porte également aux effets immédiats, à court terme et à long terme.
Par le principe des soins responsables, la capacité des individus, familles, groupes et communautés de s'occuper de leur bien-être individuel et collectif est admise et reconnue (e.g. par l'obtention du consentement éclairé). Ce principe ne remplace ni n'amoindrit cette capacité. Cependant, les psychologues considèrent que leur responsabilité face au bien-être de l'individu, de la famille et de la communauté augmente parallèlement au degré de vulnérabilité des personnes concernées et à la perte de leur autonomie. Pour cette raison, comme dans le Principe I, les psychologues considèrent qu'il est de leur responsabilité de renforcer les mesures de protection proportionnellement au degré de dépendance et à l'absence d'initiative personnelle des personnes en cause. Toutefois, dans le contexte du Principe II, les mesures de protection ont pour objectif le bien-être de la personne plutôt que le respect de ses droits.
L'utilisation des animaux dans la recherche et l'enseignement sont également des éléments qui font partie des soins responsables que doivent fournir les psychologues. Bien que les animaux n'aient pas les mêmes droits que les personnes (e.g. consentement éclairé), ils ont le droit d'être traités avec humanité et ne pas être exposés inutilement à l'inconfort, à la douleur et à la perturbation.
Normes de déontologie
En adhérant au Principe des soins responsables, les psychologues devraient :
Soins généraux II.1 protéger et promouvoir le bien-être des clientes, étudiantes, participantes à la recherche, collègues et autres; II.2 éviter de faire du tort aux clientes, étudiantes, participantes à la recherche, collègues et autres; II.3 accepter la responsabilité des conséquences de leurs actions; II.4 refuser de conseiller, de former et d'informer quiconque qui, selon la psychologue, aurait l'intention d'utiliser ces connaissances ou techniques pour nuire aux autres; II.5 faire tous les efforts possibles pour éviter que le savoir psychologique ne soit utilisé volontairement ou non pour nuire aux autres; [Table des matières] Compétence/connaissance de soi II.6 n'exercer que les fonctions (sans supervision) pour lesquelles leur compétence à aider les autres est établie; II.7 ne pas déléguer des activités à des personnes incompétentes ou n'ayant pas la capacité de les exécuter pour le bénéfice des autres; II.8 prendre des mesures immédiates pour obtenir une consultation ou pour référer une cliente à une collègue ou autre professionnelle appropriée de façon à lui procurer un service des plus compétents possible; II.9 se tenir informées du développement des connaissances et des dernières méthodes de recherches et techniques par la lecture de la littérature pertinente, la consultation des pairs et des activités d'éducation permanente afin que leurs services ou leurs activités de recherches et les conclusions qui en découlent puissent bénéficier aux autres et non leur nuire; II.10 évaluer comment leurs antécédents, leurs attitudes, leur culture, leurs croyances et valeurs personnelles, le contexte social, les différences individuelles et les pressions influencent leurs interactions avec les autres et intégrer cette prise de conscience à tous leurs efforts pour agir au bénéfice des autres et ne pas leur nuire; II.11 afin de ne pas nuire aux autres, demander l'aide qui s'impose ou interrompre l'activité scientifique ou professionnelle pour une période de temps appropriée lorsqu'une condition physique ou psychologique diminue leur capacité d'aider; II.12 afin de ne pas nuire aux autres, s'occuper de son propre bien-être pour prévenir des conditions psychologiques (e.g., épuisement professionnel, assuétude) susceptibles de modifier leur jugement et d'amoindrir leur capacité d'aider; [Table des matières] Analyse des risques/bénéfices II.13 évaluer de façon appropriée les individus, familles, groupes et communautés impliqués dans leurs activités afin de pouvoir discerner ce qui peut être bénéfique de ce qui peut nuire à ces personnes; II.14 être suffisamment sensibles et informées à propos des différences et des vulnérabilités individuelles pour distinguer ce qui peut être bénéfique aux autres de ce qui peut leur nuire; II.15 faire des études préliminaires afin de déterminer les effets des nouvelles procédures et techniques qui pourraient comporter certains risques avant de penser à en généraliser leur utilisation; II.16 dans toute recherche recourant à des procédures dont les conséquences sont inconnues ou qui pourraient causer du mal, de la douleur et de l'inconfort, demander une révision éthique indépendante et adéquate où les risques et les bénéfices possibles seront pondérés avant de décider de poursuivre cette étude; II.17 ne s'engager dans aucune activité scientifique ou professionnelle à moins que les bénéfices probables soient proportionnellement plus grands que les risques encourus; [Table des matières] Maximiser les bienfaits II.18 fournir les services coordonnés sur une période de temps avec les autres intervenants afin d'éviter les dédoublements ou les malentendus. Cette coordination sera facilitée par le maintien de dossiers adéquats et la communication avec les autres intervenants; II.19 se renseigner à propos des connaissances et des techniques des autres disciplines (e.g., droit, médecine) et recommander l'utilisation de ces connaissances et techniques pour le bénéfice des autres; II.20 s'efforcer d'obtenir le meilleur service possible pour ceux qui requièrent des services psychologiques. Ceci peut impliquer la référence à d'autres professionnelles que des psychologues, si nécessaire; II.21 surveiller et évaluer les effets de leurs services et de leurs activités, consigner leurs découvertes par écrit et, lorsqu'approprié, faire connaître leurs découvertes aux autres personnes partageant le même secteur d'intérêt; II.22 donner un compte rendu aux participantes d'une recherche, de façon à augmenter leurs connaissances et leur faire prendre conscience de leur contribution au savoir; II.23 se préparer soigneusement pour leurs cours de façon à ce que le contenu de leur enseignement soit à jour et bien documenté; II.24 assumer leur obligation de faciliter le développement professionnel de leurs étudiantes, stagiaires, employées et supervisées en s'assurant que ces personnes comprennent les valeurs et les règles d'éthique de la discipline et en leur fournissant ou en se chargeant d'obtenir des conditions adéquates de travail, des évaluations en temps opportun, des consultations fructueuses et des occasions de prendre de l'expérience; II.25 encourager et aider les étudiantes à publier leurs meilleurs travaux; [Table des matières] Minimiser les torts II.26 être extrêmement conscientes de la relation de pouvoir en thérapie, ne pas encourager l'intimité sexuelle avec les clientes ou les clients en thérapie ni s'engager dans ce type de relation durant le cours de la thérapie ou durant cette période de temps après la thérapie où on peut s'attendre à ce que la relation de pouvoir influence la prise de décision personnelle de la cliente ou du client; II.27 éviter de s'engager dans des activités qui pourraient être risquées pour des individus impliqués accidentellement; II.28 être extrêmement conscientes du besoin de discrétion lorsqu'elles font un rapport écrit et communiquent de l'information, afin que cette information ne soit ni interprétée, ni utilisée au détriment des autres. Ceci comprend, sans y être limité: ne pas inscrire de l'information qui pourrait être mal interprétée ou mal utilisée; éviter les hypothèses; émettre clairement ses opinions; communiquer l'information dans un langage qui peut être bien compris par la personne à qui cette information est destinée; II.29 dans le cas où elles ne seraient pas en mesure de répondre personnellement à une demande de services psychologiques ou de faire d'autres activités nécessaires, apporter une aide raisonnable pour trouver la ressource requise; II.30 lorsque l'on réfère une cliente à une collègue ou à une autre professionnelle, maintenir le contact avec elle, la supporter et demeurer responsable des soins jusqu'à la prise en charge par la collègue ou l'autre professionnelle; II.31 avant d'interrompre les services à une cliente, lui donner un avis raisonnable et être certaines que l'arrêt des services ne lui sera pas préjudiciable; II.32 lorsqu'une recherche présente des risques pour certaines participantes ou peut leur causer du tort, procéder à une sélection des participantes en choisissant celles qui vraisemblablement n'encourraient aucun risque; II.33 agir de façon à minimiser l'impact de leurs activités de recherche sur la personnalité des participantes de même que sur leur intégrité physique et mentale; [Table des matières] Parer/corriger les torts II.34 mettre fin à toute activité apparaissant clairement comme plus dommageable que bénéfique ou lorsqu'elle n'est plus nécessaire; II.35 refuser d'aider les individus, familles groupes ou communautés à poursuivre des activités ou à s'y prêter, lorsque, selon les connaissances actuelles ou des avis légaux ou professionnels, elles risquent vraisemblablement de leur causer des dommages psychologiques ou physiques graves ou d'en faire aux autres; II.36 lorsque les actions des autres risquent de causer des torts physiques graves ou la mort, faire tout ce qui est raisonnablement possible pour empêcher les conséquences de ces actions. Ceci peut impliquer faire rapport aux autorités appropriées (e.g. la police) ou à la victime éventuelle et ce, même si une relation confidentielle est impliquée; II.37 lorsqu'une psychologue apprend hors du cadre d'une relation confidentielle avec une cliente qu'une psychologue ou un membre d'une autre discipline se livre à des activités nettement dommageables, agir de façon à empêcher les conséquences de ces activités. Selon la nature des activités en cause, ceci pourrait comprendre les mesures suivantes: avoir une conversation informelle avec la personne concernée; obtenir de l'information objective et s'assurer que les activités préjudiciables seront interrompues et que les torts seront réparés. Cependant, si les torts causés sont graves et que la situation persiste, demander à l'organisme, autorité ou comité régissant la discipline ou la profession d'intervenir; II.38 ne pas exposer à de graves inconvénients un individu, groupe, famille ou communauté ayant besoin de services en les en privant pour une période de temps excessive afin de se conformer à des conditions expérimentales et, quand les ressources le permettent, leur offrir, une fois la recherche terminée, des services qui ont déjà fait leur preuve ; II.39 donner de l'information aux participantes d'une recherche de façon à pouvoir identifier tout tort qui aurait pu être causé et, s'il y a lieu, prendre les mesures pour y remédier; [Table des matières] Soins des animaux II.40 lors de recherches, n'utiliser des animaux que si on peut raisonnablement s'attendre à ce qu'ils contribuent à comprendre les structures et les processus sous-jacents au comportement ou aident à mieux connaître l'espèce particulière utilisée dans la recherche ou encore qu'il en résulte des bénéfices pour la santé et le bien-être des autres animaux et des humains; II.41 recourir à une méthodologie exposant les animaux à la douleur, au stress et aux privations, seulement en l'absence d'autres méthodes alternatives et si les retombées recherchées au plan scientifique, éducationnel et pratique en justifient l'utilisation; II.42 adopter toutes les mesures possibles afin de minimiser l'inconfort, la maladie et la douleur chez les animaux. Dans ce but, on pourrait, entre autre, effectuer toute intervention chirurgicale uniquement sous une anesthésie appropriée et recourir à des techniques pour éviter les infections et diminuer la douleur durant et après l'opération. Si les animaux utilisés pour l'expérimentation doivent être exterminés à la fin de l'étude, procéder de façon humanitaire; II.43 ne recourir aux animaux pour les démonstrations en classe que dans les cas où l'on ne peut atteindre les mêmes objectifs pédagogiques en utilisant des bandes magnétoscopiques, des films ou autres moyens et à condition que ce genre de démonstration soit justifié par l'apport de ce type d'enseignement; [Table des matières] Prolongement de la responsabilité II.44 lorsqu'approprié, encourager les autres à prodiguer des soins responsables; II.45 assumer la responsabilité générale des activités scientifiques et professionnelles de leurs adjointes, étudiantes, supervisées et employées en ce qui concerne le principe des soins responsables, toutes ces personnes encourant néanmoins des obligations similaires.
1991. Tous droits réservés.
Société canadienne de psychologie